Autodétermination numérique – Chapitre 1

L’importance croissante des données numériques

Dans cette vidéo, vous apprendrez:

  • Les données numériques sont des valeurs transmises, traitées ou lisibles sous forme numérique, qui constituent une base d’innovation et de progrès. 
  • Elles ont des propriétés spécifiques, telles que la non-rivalité, la facilité de reproduction et de traitement, et sont généralement le sous-produit d’une activité économique ou sociale.
  • Les plateformes numériques ont créé un effet de réseau qui leur donne un avantage concurrentiel et la capacité de générer davantage de données qu’elles peuvent monétiser ou utiliser pour développer de nouveaux produits ou services parfois aux dépens des utilisateurs.

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Transcription de la vidéo

Ces dernières années, l’économie et la société ont été fondamentalement transformées par la numérisation et par l’utilisation des données qui en découle.

Le volume, la diversité des données ainsi que la vitesse de traitement ont augmenté rapidement et ouvrent de nouvelles possibilités.

Selon l’étude de l’Institut Fédéral de la Propriété Intellectuelle, le taux de croissance du marché des données entre 2017 et 2018 était de près de 8% en Suisse et près de 10% en Europe. Faisant ainsi des données l’unité de base de la révolution numérique.

Mais alors que sont exactement ces données numériques ? Les données numériques ou digitales, sont des valeurs transmises, traitées ou lisibles sous forme numérique.

Aujourd’hui, la production croissante de données, d’une part, et l’amélioration des possibilités d’analyse et d’utilisation, d’autre part, constituent une base d’innovation et de progrès.

Les données numériques fournissent par exemple des informations sur les préférences des clients, la disponibilité des ressources ou l’efficacité des mesures. Elles ouvrent la voie à de nouvelles possibilités de diagnostic et de prévention en médecine, à de meilleures connaissances sur les modèles de fertilisation et d’alimentation en agriculture ou à des services plus efficaces pour les organisations et les particuliers.

Les données ne sont pas précieuses en soi, mais acquièrent leur valeur en fonction d’une utilisation spécifique pour laquelle elles sont nécessaires. Elles font donc partie d’une chaîne de création de valeur numérique : ce n’est qu’en mettant en lien différentes données que l’on génère des informations et ce n’est qu’en analysant ces informations et ces données en vue d’un objectif précis que l’on obtient des connaissances qui font sens et peuvent servir de cadre d’orientation.

Ces données numériques ont des propriétés spécifiques :

  • Elles sont non-rivales. En principe, les mêmes données peuvent être utilisées, partagées, mises en lien et réutilisées par différents acteurs et à des fins différentes, sans perdre de leur valeur.
  • Elles ne sont pas automatiquement exclusives. Pour exclure des tiers de la consultation ou de l’utilisation de données, il faut prendre des mesures de nature technique, juridique ou organisationnelle. Différentes raisons peuvent motiver l’exclusion (p. ex. des raisons réglementaires, comme la protection des données, ou des raisons économiques, comme un avantage concurrentiel). Sans ces mesures, les données sont en principe accessibles à tous.
  • Elles sont facile à reproduire et traiter. Les données peuvent être facilement copiées. En particulier si elles sont lisibles par une machine et structurées dans des formats ouverts, elles peuvent également être facilement traitées et redistribuées.
  • Elles sont généralement le sous-produit d’une activité économique ou sociale. La production de données est en partie le sous-produit d’une activité économique ou sociale principale (p. ex., l’utilisation d’un appareil, la réalisation d’une opération commerciale, etc.). Par conséquent, contrairement à d’autres bases d’innovation, les données peuvent en partie être générées sans grands investissements ni coûts de recherche et de développement.

A présent, les principaux utilisateurs des données numériques sont des acteurs individuels que l’on connaît sous le nom de plateforme numérique”.

Ces plateformes numériques mettent à disposition leurs infrastructures aux clients et aux fournisseurs tiers tels que des vendeurs ou annonceurs.

Les données que tirent les plateformes numériques de l’utilisation des utilisateurs sont “propriétaires”, c’est-à-dire qu’elles sont accessibles uniquement par la plateforme privée qui les utilise à des fins commerciales.

Plus il y a d’utilisateurs de la plateforme, plus celle-ci devient intéressante pour les fournisseurs tiers qui souhaitent proposer leurs services sur celle-ci.

Cette concurrence entre les fournisseurs tiers sur la plateforme tire les prix vers le bas et permet d’accéder à des gammes de produits plus larges rendant les utilisateurs de la plateforme dépendante de celle-ci.

Ce monopole de la plateforme permet également à celle-ci de générer davantage de données qu’elle peut monétiser ou utiliser pour développer elle-même des nouveaux services ou produits. Cette dépendance créée par le nombre élevé d’utilisateurs est ce qu’on appelle l’effet de réseau.

Ceci peut également favoriser une position dominante susceptible de s’étendre au-delà du secteur et domaine d’origine.

Aujourd’hui, nous ne profitons cependant pas assez du potentiel des données. Les plateformes ont révolutionné l’utilisation des données en créant des produits et services qui créent une importante plus-value économique pour les entreprises concernées et leurs utilisateurs.

Cependant les autres secteurs restent en retard, dans d’autres secteurs importants de notre société, tels que la mobilité, la santé et l’éducation, les services personnalisés permettent des améliorations considérables. Les données servent de moteur aux innovations, à l’efficacité et aux décisions réfléchies basées sur des faits. Par conséquent, il est intéressant et essentiel, dans une perspective économique, sociale et sociétale, d’utiliser les données de manière optimale.

Actuellement, l’intensification de l’utilisation des données pose également de plus en plus de défis aux citoyens, notamment en ce qui concerne la protection et l’exercice de leurs droits fondamentaux à la protection de leur sphère privée et de leurs données personnelles, respectivement à l’autodétermination en matière d’information. Ceux-ci n’ont souvent pas le choix car les données sont souvent partagées non pas sur la base de la transparence ou de la confiance, mais parce que l’utilisation des applications numériques exige la communication de données. Les différents scandales liés à cette utilisation non consentie des données et la possibilité l’établissement de profils de personnalité ou de comportement sur la base de données, ainsi que les abus possibles et effectifs, créent naturellement de la méfiance et provoquent un malaise de la part des utilisateurs.

Pour améliorer, l’utilisation du potentiel des données nous devons surmonter le paradoxe de l’utilisation des données. Ce paradoxe s’explique par le fait que pour renforcer la confiance et le contrôle, l’échange de données devrait être généralement limité, alors que la réalisation des potentiels de création de valeur nécessiterait au contraire davantage d’échanges et de mises en liens de données.

Ce « conflit » est généralement présenté comme binaire et gagnant-perdant, et donne l’impression qu’il faut choisir entre une protection efficace et une utilisation accrue des données. La politique des données est ainsi tiraillée entre la protection et l’utilisation des données.

En résumé, les données sont réparties de manière inégale et souvent concentrées auprès de quelques grandes entreprises. Ces entreprises utilisent ces données de manière propriétaire afin de créer une plus-value et échappent à un véritable contrôle qui contribue à l’érosion de l’autodétermination ainsi qu’à la consolidation d’une position dominante.

Dans l’économie de plateforme actuelle, les utilisateurs et prestataires de services ne disposent guère d’organisations pour défendre leurs intérêts. Ce déséquilibre et l’effet de réseau des plateformes conduisent souvent les utilisateurs à accepter des conditions qui leur sont défavorables tant sur la sphère privée que sur le plan économique.

Dans l’espace numérique, les utilisateurs disposent d’une capacité décisionnelle limitée. Ils manquent souvent de connaissances pour prendre des décisions autodéterminées. Des données sont partagées de manière irréfléchie, surtout si l’absence de consentement entraîne une restriction du service proposé.

Pour créer un système fiable de partage des données, il faut, outre les mesures de protection nécessaires, également prévoir des incitations suffisantes, tant pour les particuliers que pour les entreprises. Actuellement, les entreprises possédant les données en profitent principalement, car elles les utilisent de manière propriétaire. Ces entreprises sont généralement peu incitées à changer quoi que ce soit à leur statut privilégié. Elles contribuent à empêcher d’exploiter pleinement le potentiel des données.